Le mouroir de Dolly.

Enfermé.

dimanche 12 août 2012 à 20h38

Le soleil se couche et par delà la fenêtre,
J’observe silencieusement le crépuscule tomber.
Demain à l’aube y serai-je encore ? Peut-être !
Je ne me lasse jamais de vous observer.

Pendant que les rayons dorés se meurent dans l’ombre naissante,
Les réverbères s’éclairent dans la rue.
Et les heures passent, il est vingt heures trente,
Quand reviendras-tu ?

Le sommeil se fait attendre, ma vue est altérée.
Qui sont tous ces gens aux mines atterrées ?
Je me demande pourquoi c’est toujours la nuit,
Que ces malheureux viennent chercher un sursis.

Mon front aux vitres est appuyé et j’attends,
Un sourire, un geste, une action seulement,
Mais ici-bas il n’y a que des fantômes
Des êtres glacés, immobiles et atones.

Les lumières de l’immeuble d’en face
Semblent éclore petit à petit,
Les ombres d’en bas cherchent une passe,
Pour de la clarté ne pas être éblouies.

Quelques voitures passent et jettent,
Par leurs fenêtres ouvertes des gerbes desséchées
De fleurs fanées, d’amour gâché.
Et moi tristement, je reste.

Ô ciel, qu’ai-je fait,
Pour depuis ma fenêtre être condamné
A observer sans jamais prendre part,
A rêver de ce vaste miroir ?

Mon cœur est pourtant rempli,
De ces passions violentes que je ne peux assouvir
Collé aux carreaux, malade et proscrit
Je laisse le temps me mutiler à loisir.

Dans cette chambre froide et blanche,
Je n’ai qu’un seul répit,
Pouvoir contempler la vie qui bouillonne,
Depuis ces fenêtres qui de toi m’emprisonnent.

Le temps s’égraine et je pleure,
Chaque minute un peu plus,
De voir qu’en ce lieu je me meurs,
Et que la vie en bas continue.

Toujours à la recherche d’une distraction,
Je pose mon regard,
Sur cette jeune fille à l’étrange position,
Toute vêtue de noir.

Comme les autres elle porte sur elle le chagrin,
Celui que confère l’absence.
Mon enfant, je te comprends si bien,
Moi qui comme ami n’est que l’indifférence.

Lorsqu’elle leva ses yeux à ma fenêtre perchée,
Nos regards se croisèrent l’espace d’un instant,
Qui aurait cru qu’en si peu de temps
Je perdrai à jamais la faculté d’aimer ?

Son regard était sombre et son teint blafard,
Je n’avais de ma vie jamais vu un visage
Ressemblant autant à un mirage,
A un véritable cauchemar.

Pétrifié par la peur de ce double effrayant
Je cherchais quelque répit en un autre endroit,
C’est ainsi que par hasard mon regard fuyant
Se posa sur toi.

J’eus à peine reconnu l’ombre de ton sourire,
Que mon cœur s’arrêta un instant.
Ô j’aimerai mieux mourir,
Que de vivre sans toi encore longtemps.

Et ta main s’est levée,
Contre la vitre j’ai frappé,
J’ai crié, j’ai pleuré,
Et ton sourire s’est brisé.

Tout est redevenu poussière,
Ton ombre, leurs plaintes, et mes veines chimères.
Et dans ma triste rue ne restèrent
Que les lumières mourantes des réverbères.

Vide et las de ma solitude,
Je voulus chercher une nouvelle distraction.
Mais la vie et son ingratitude
Décidèrent de me laisser seul face à l’horizon.

Quelle tristesse !
Tout à disparu.
Et moi, pauvre âme en détresse
Je recherche mon idylle perdue.

Vous comprenez, quand vous êtes malade
Triste, seul et abandonné,
Vous cherchez avidement une distraction,
Une chose qui tuera votre perdition.

Il se trouve que cette fenêtre close, c’est un peu cela,
Une ouverture sur le monde sans sortir de chez soi.

Voilà, maintenant vous connaissez l’histoire,
De cette rue perdue au milieu de nulle part
Où la nuit d’étranges personnages
Viennent doucement vous conter leur histoire.

Et vous, comme moi, derrière les carreaux,
Le front collé aux vitres, vos barreaux,
Vous observez avec une attention particulière
Comment évoluent ces étranges personnages sur la terre.

Vous riez parfois car niché tout en haut,
Vous vous sentez maître du monde derrière les rideaux,
Vous en perdez la tête et l’esprit,
Vous remontez en rampant sur votre lit.

Je crois qu’il me faut ici m’arrêter,
Car je deviens fou de vous conter
Ce à quoi mes yeux tentent de s’abreuver
A travers cette fenêtre hantée.

Le soleil se lève et par delà la fenêtre,
J’observe silencieusement l’aube qui naît.
Ce soir au crépuscule y serai-je encore ? Peut-être !
Je ne me lasse jamais de vous observer.