Insupportable, cette magie qui cessait d’opérer, se refusait à elle-même.
La poésie d’antan devenue vulgarité.
La subtilité rendue au paroxysme de la perversion.
J’étais stupéfaite.
Le matin en me levant, il se faisait timide face à mes sens en éveil. Mais lentement, insidieusement, il s’insinuait partout jusqu’à déborder.
Mon coeur bat douloureusement dans ma poitrine et ma main est crispée autour du stylo qu’elle emploie. Se remettre à écrire après tant d’années est la preuve accablante de mon échec. Ceux qui s’en réjouiront n’auront pas compris que chaque mot se paye par la douleur et la souffrance. J’ai beau me battre contre mes démons, c’est moi-même qu’il me faut affronter à chaque fois. Et c’est insupportable.
Je crève de me mépriser, et de me haïr. Cela m’épuise aussi bien moralement que physiquement. Je rebascule dans ce shéma horrifique où je n’ai plus de désirs, plus d’envies, plus rien d’autre que ce besoin impérieux d’être sauvée. Alors je m’enferme toujours plus pour ne rien laisser paraître, et l’étau du silence se referme sur moi. Je ne le supporte plus.
Autrefois il me suffisait d’étouffer mes pleurs en silence avant de m’enfuir dans le monde des rêves pour que tout s’arrange. A présent, mes larmes s’accompagnent de spasmes et de tremblements violents et mes rêves sont morts. Ces épisodes qui ne duraient que quelques heures auparavant durent désormais des jours entiers, des semaines parfois. Je ne sais plus quoi faire.
Dans mes moments de "crise", je me sens tellement vide, tellement rien, que je serais capable de faire n’importe quoi pour me réveiller de ma torpeur. Je crains le jour où je ne saurai plus m’arrêter à temps.
Je suis fatiguée d’être mon propre fardeau, fatiguée de ces chaînes qui m’entravent. Je refuse de consulter car j’ai bien trop peur de mettre des mots sur ce qui m’étouffe. Je ne veux pas entendre que je suis malade. Je ne veux pas prendre de médicaments. Je ne veux pas me voir telle que je suis.
Dolly
]]>Je suis magie effondrée, les douze coups de minuits qui évaporent l’enchantement et révèlent les haillons. Je me sens si sale, si laide, si vide. Je retourne progressivement à cet état d’antan où je voulais disparaître. Mais la colère s’ajoute à présent à ma peine. Tu étais le seul à pouvoir me sauver et tu as ignoré mes cris. Comme eux, comme les autres. Et je saigne plus que jamais car je t’ai pourtant tout donné sans réserve. Tu connais mes plus grandes failles même si tu as toujours pris soin de ne jamais m’en parler. J’ai l’impression de te faire honte. Je voulais simplement que l’on se tienne la main pour toujours. Je voulais être la première. Je voulais être aimée mais je ne rencontre que le vide. Vais-je donc m’écrouler pour de bon ? La fuite m’obsède. Je voudrais partir loin et que pour une fois l’on vienne me chercher. Que la porte ne claque pas. Que je ne rencontre pas le mépris et l’indifférence coutumiers. Que je me mette réellement à compter pour quelqu’un.
Un jour ce sera ton tour de rentrer et de te retrouver face au vide. Il n’y aura plus de bruits, plus de rires ou de pleurs. Juste l’écho de tes pas dans le silence. Je ne t’attendrai plus.
]]>On croît parfois oublier et tout finit par ressurgir. On pense parfois se souvenir pour toujours et le temps estompe les gestes et les mots. La vie est un entre - deux perdu à mi-chemin entre déni de soi et désir du néant. Un vide béant dans l’âme permet de s’ôter toute sensation ou sentiment.
Il était une fois une enfant muette au milieu du chaos de sa jeunesse bafouée. Mutilée de l’intérieur, le sang s’échappe par tous les pores de sa peau et glisse, s’écrase sur le blanc immaculé. Elle voudrait courir, s’enfuir mais ses jambes ne la portent plus. Elle ne comprend pas, ne comprendra jamais. Par honte ou par crainte, son esprit se ferme, comme le cachet de cire brûlant sur le papier froid. Sur un corps coupé en deux, coupé du monde extérieur et de ses bruits qui la blessent.
Où aller désormais ? Vers qui trouver une main douce et réconfortante ?
Personne. Plus de contact, plus de sensations. Elle voudrait bien mourir mais n’est pas sûre de ce que cela signifie. Au moins elle serait loin. Elle n’aurait pas à retourner en enfer. Mais il faut lutter, il faut vivre. Maman ne le supporterait pas n’est-ce pas ? Maman ne doit jamais savoir.
Dix-sept ans d’agonie pour vingt ans de vie. Insomnie. Amnésie. Hérésie. Et cette fêlure ancrée comme pour figer à jamais la différence. Ce vitriol en lettres de sang sur le corps nu d’une enfant.
]]>Ridicule. Voilà ce que je suis. Tout donner, tout confier jusqu’aux secrets les plus enfouis et pour quoi ? Pour rien. Toujours seule avec les mêmes démons que l’on ignore, la même solitude qui ronge, la même angoisse qui tord le ventre et qui comprime les poumons. Je t’attendais mais tu n’es pas revenu. Tu reviendras mais t’attendrai-je encore ? Rien que l’idée de quitter ton monde me rend malade et pourtant y demeurer me rend malheureuse. Tes paroles résonnaient comme une promesse à laquelle je voulais croire. Aujourd’hui elles sont des cendres dans ma bouche, des larmes sur mes joues, un poids sur mon coeur.
Tu ne viendras pas. Tu ne viendras pas. Tu ne viendras pas.
Dis-moi quelle est ma place dans ton coeur ? Où puis-je me situer ? Tu dis que je suis la première mais tes gestes démentent tes paroles. Tu promets tout, tu ne donnes rien. Et moi je demeure, seule. Le jour. La nuit. Pour quelques kilomètres que tu ne franchiras pas. Pour un message que tu ne m’enverras pas.
J’ai mal. Mon passé me fait mal. Le sais-tu ? Mon présent me fait mal. L’ignores-tu ?
Je cours et je trébuche mais tes bras ne sont pas là pour m’accueillir. Je tombe et m’écorche les genoux comme avant. Je suis toujours Dolly, moins jeune mais toute aussi meurtrie. Les bras sont toujours des mirages, les bouches toujours des poisons sur lesquelles s’épanchent les paroles les plus douces et les plus belles. Celles qui viennent te cueillir au creux de l’âme et te tordent le coeur jusqu’à-ce qu’il n’en reste que des lambeaux et des cendres.
]]>N’oublie pas de vivre.
]]>J’étais seule.
Au loin des rires d’enfants faisaient écho à la chute vaporeuse de la neige. Des familles, heureuses. Et moi seule dans cette pièce, seule dans mon cœur. Une main crispée sur ma poitrine, je tentais vainement de me préserver de la douleur du temps qui passe. Du temps qui tue. Je songeais aux choses dites, aux choses tues. A l’existence, au néant. Et surtout au fait que je voulais faire quelque chose de ma vie. Je voulais aider, donner, offrir. Créer, inventer. Animée des meilleures intentions, j’étais décidée à changer les choses. Moi, volontaire et décidée. Moi, immobile dans mes draps défaits.
Puis un jour, je me suis levée.
J’ai attrapé ma veste, mes bottes, et je suis sortie. Dehors, tout était blanc, immaculé. A l’intérieur, c’était mon être entier qui hurlait. Je me suis mise à courir. D’abord lentement, puis de plus en plus vite. Une flaque d’eau m’éclaboussa, mais cela m’importait peu. Rien n’avait d’importance. Rien ne comptait plus, car tu n’étais pas là. Un gémissement de douleur monta jusqu’à exploser en un cri furieux. Je glissais et tombais dans la neige. Le rouge de mes cheveux tranchait avec la pureté du blanc et je me souvins. Encore le même souvenir, la même angoisse, l’ultime phobie. Mon esprit se braqua, furieux de l’intrusion spontanée dont il était la victime. Dans un état d’angoisse avoisinant la folie, je me roulais sur le sol en espérant disparaître. Heureusement que tu n’étais pas là.
Lorsque le calme revint, je retrouvais ma position léthargique.
Je repris une profonde inspiration en songeant au bonheur de te connaître. En me relevant pour reprendre le chemin du retour, je pris conscience de l’état désastreux de mon âme. Mon corps reflétait-il toute cette détresse ? Décidée, j’entamais le chemin du retour. Songeant aux malheurs de ce monde, je pris la résolution de faire au mieux pour aider. Femmes, enfants, mendiants, mourants. Comment une humanité si nombreuse pouvait-elle supporter tant d’injustice ? Pauvres et riches, malheureux ou heureux, à quoi cela tenait-il ? J’allais faire quelque chose oui. Enfin, j’allais me rendre utile. Le sourire reparût sur mes lèvres gelées.
A mi-chemin, je m’arrêtais. Sans un mot, je pris appui sur une branche et me mit à pleurer.
]]>Les lèvres glissent dans le cou, s’attardent çà et là. Mais tout est très rapide. Il faut faire vite. Ne pas être vu. Ne pas être surpris. Museler l’enfant. Fermer la cage. Jeter la clé dans l’abîme. Comme ça. Comme rien.
Et enfin. L’abandonner. Être abandonnée. Se relever chancelante, honteuse et perdue. Se retrouver dans le noir. Courir vers la lumière. Traverser le couloir et plonger vers la sortie. Puis se retrouver dehors, seule. Prostrée. Coupée en deux. Corps inexistant. Esprit déconstruit. Et bientôt, très bientôt, savoir qu’il faudra y retourner.
Dehors il pleut mais son écho reste lointain pour la jeune fille. Dans la pénombre de sa chambre, les volets grands ouverts, elle espère que la violence de l’orage saura la cueillir et annihiler son âme. Elle compte jusqu’à trois et sa mémoire bascule. Elle voit la forêt, le loup et l’enfant. Il y a comme une odeur d’herbe coupée, de feu de bois et d’hôpital. Au toucher.. Non. Il n’y a pas de toucher. Pas d’étreinte. Pas de caresse. La conscience s’altère de nouveau et la mémoire s’éteint. Pour longtemps, très longtemps.
Se réveiller. Comme après un coma. Comme après un répit. Un oubli. Se réveiller en plein cauchemar. Vouloir s’en sortir. Apprendre à aimer. Retrouver la peur. Retrouver l’effroi. Fuir encore. Fuir toujours. Pourquoi la neige n’est-elle pas rouge ?
Revenir. Recommencer. Aimer encore. Aimer toujours. Plus que la mort. Plus que la vie. Plus que la peur. Et découvrir, se découvrir. Vouloir. Pouvoir. Créer à deux. Croire en l’autre. Lui offrir la clé oubliée et se donner entièrement. Dernière chance. Dernier espoir. Premier amour.
]]>
J’ai cru mentir en affirmant t’aimer mais je mentais dans mon mensonge présupposé. La vie est ainsi faite, chemin douloureux, sinueux, tortueux. Je me suis trompée mais je n’ai pas menti. Pas une minute, pas la moindre seconde. Aujourd’hui je fuis encore en prétextant affronter la réalité. Je m’agace mais je commence à comprendre. A me comprendre. Il était temps. J’ai peur de l’abandon bien plus que du noir. J’ai peur de la laideur et de l’oubli. Mais j’ai aussi peur de vaincre, comme si fendre mon ennemi allait me briser comme de la glace. Cette peur, je n’en veux plus. Je veux grandir et devenir belle, rayonnante, lumineuse.
Ce coeur que tu m’offres, laisse-moi enfin le prendre dans mes bras et le couvrir de mes baisers glacés. Le temps est long lorsque tu es loin et je meurs d’angoisse loin de ta présence. Je me suis enfuie, me voilà revenue. L’avenir me fait peur, mais le présent sans toi n’est que l’ombre amère d’un passé révolu. Laisse-moi donc pleurer à genoux, te supplier d’excuser mes mots. Mes maux. Tout ce qui empoisonne l’existence et qui doit être banni. Mon coeur, mon corps, je te les offre volontiers si tu me délivres de cette solitude atroce, de cette abominable déchirure à l’âme. Ainsi je te montrerai qu’il existe une chaleur, un souffle brûlant au fond de mon être qui sera toujours prêt à t’embrasser et à te chérir.
Je ne fuirai plus. Je te me cacherai plus. Je te laisserai enfin prendre ma main dans la tienne et nous avancerons toujours plus loin. Toujours ensemble.
La petite fille n’est plus triste car elle a rencontré le petit garçon qui l’attendait
Joy.
]]>La petite fille lâcha la main du garçon et se perdit dans le néant.
]]>Maintenant je sais papa. Je sais que tout meurt en l’absence d’amour.
]]>Voilà, avait-il dit. Rien n’existe à l’infini, tout finit par se briser. Et toi, insignifiante et oubliée, salie et prostrée, tu demeures au milieu d’un monde qui te hait, suspendue au-dessus des flammes. Personne ne viendra te sauver et tout ce que tu toucheras finira par mourir. Aucune puissance salvatrice ne viendra te cueillir. Ta mémoire sera ton tombeau, fermée et dissimulée dans les tréfonds de ton âme. Les gens se battront pour exister à tes yeux et se consumer sur tes lèvres. Tu seras aimée et haïe. Celle qui prend et celle qui tue. Déchirée entre corps et esprit. Mutilée par la foule et hantée par le regard des gens absents. Telle sera ta destinée.
Personne ne savait à quel point j’étais malheureuse. J’ai porté ce fardeau tant d’années qu’un jour mon coeur a explosé et ses lambeaux se sont disséminés dans l’atmosphère. Les gens ont continué à aimer, rire et sourire comme si de rien n’était. Ils savaient et ils n’ont rien dit. Ce jour-là, j’ai compris que je serai seule toute ma vie et que je n’aimerai jamais plus.
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Je me souviens de ces nuits où, recroquevillée sur moi-même, je pleurais à chaudes larmes en tremblant. Je me rappelle ces crises d’angoisse violentes durant lesquelles je ne cessais de me répéter que je n’étais pas faite pour aimer. Mais surtout, mon souvenir se porte sur tous ces moments où l’on me répétait que je n’étais rien et que j’avais fini par croire. Je voudrais aujourd’hui crier à ces démons du passé qu’ils se leurraient. Qu’un rien pouvait se transformer en tout par une seule présence : la tienne.
Je passerai des heures à baiser tes lèvres et tes joues avec une infinie gratitude pour te remercier de m’avoir sauvé de l’enfer. Tu es mon héros, mon soleil. Les nuits qui m’effrayaient autrefois te sont désormais dédiées car ta présence sublime chacun de mes rêves. Je voudrais dans ces moments tenir ta main et qu’ensemble nous marchions vers les étoiles. Je voudrais te montrer que malgré la souillure je peux encore briller. Tel le phœnix renaissant de ses cendres, je redeviendrai pure, insouciante et innocente. Pour toi.
Je t’en prie, ne perds jamais cette noblesse d’âme que tu possèdes. Ne te laisse pas corrompre, n’abandonne pas. La vie vaut la peine que l’on se batte pour elle, et je ne laisserai personne détruire la tienne. Laisse ton passé devenir ta force, soit fier du chemin parcouru. N’oublie pas que je serai toujours là pour t’encourager, panser tes blessures et te donner tout l’amour qui te sera nécessaire pour avancer. La vie m’a offert ton visage et je le chérirai jusqu’à la fin des temps. Merci de m’avoir sortie du néant.
Je t’aime. ♥
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Elle était belle, l’insolente. D’une beauté incandescente et inconsciente. Apparue dans sa vie un matin d’automne. Disparue un soir d’été. Elle était libre et enchaînée, heureuse et malheureuse. Elle était ce genre de personne toujours gaie, aux yeux pétillants et au sourire ravageur. Combien l’avaient aimé avant lui ? Il préférait ne pas y songer. Du moment qu’il trouvait le moyen, le courage d’être le seul susceptible de compter. Mais elle était aussi d’une tristesse affligeante, mortifiante. Seule parmi la multitude, son âme meurtrie hurlait sa frustration en dépit des apparences. Qu’avait-elle donc, cette douce hirondelle ? Quel était ce mal qui meurtrissait ses nuits et assassinait ses rêves ? S’il l’avait su.. Peut-être alors aurait-elle été capable de l’aimer. Son secret serait devenu leur secret. Mais elle n’avait rien dit. Elle était revenue chaque jour, repartie chaque soir, avec ce même entrain, cette même chaleur. Hantée par de mystérieux et inaccessibles démons.
Et plus elle luttait contre elle-même, plus il l’aimait.
Elle était forte et fragile, tout et rien. Pour la définir pleinement il faudrait une multitude d’adjectifs antithétiques. Elle était ce gris tantôt clair comme un matin brumeux, tantôt sombre comme un printemps orageux. Tout cela le fascinait, lui, pauvre homme qui ne croyait plus en rien. Il avait suffi d’un jour, d’une présence, d’un regard pour que son univers bascule du tout au tout. Il était seul et voilà qu’ils étaient deux. Elle était tantôt là à écrire. Tantôt ici à rire. La voici qui trébuche, qui soupire, qui se baisse, qui l’observe, qui pense, qui parle, qui se tait. Même absente elle hante son univers de façon constante. Était-ce cela, l’amour ? Ou n’était-ce qu’une lubie passagère due à un isolement prolongé ? Les mois passaient et ce qui semblait n’être qu’une romance envolée se muait en une passion dévorante. Elle était là, vous comprenez. Si proche et si loin. Il lui suffisait de tendre le bras pour la toucher mais cela ne suffisait pas pour qu’elle lui appartienne. Attendre était inutile et douloureux. Il fallait agir. Mais comment diable peut-on posséder une poupée de glace aux yeux de feu ? Tout semblait écrit à l’avance, la chute était inéluctable. C’était trop d’amour, d’impatience, d’angoisse et de désir pour un seul homme.
L’assassin se meurt.
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