Je pleurais dans le noir loin des regards inquisiteurs. Je me demandais, au fur et à mesure que passaient les minutes, si quelqu’un allait finir par remarquer mon absence. Mais le monde restait sourd à l’agonie déchirante qui s’était emparée de moi. Plus je suppliais, plus les mots mourraient sur mes lèvres. Le miroir me renvoyait l’image saisissante d’une beauté flétrie avant même d’avoir pu éclore.
Voilà, avait-il dit. Rien n’existe à l’infini, tout finit par se briser. Et toi, insignifiante et oubliée, salie et prostrée, tu demeures au milieu d’un monde qui te hait, suspendue au-dessus des flammes. Personne ne viendra te sauver et tout ce que tu toucheras finira par mourir. Aucune puissance salvatrice ne viendra te cueillir. Ta mémoire sera ton tombeau, fermée et dissimulée dans les tréfonds de ton âme. Les gens se battront pour exister à tes yeux et se consumer sur tes lèvres. Tu seras aimée et haïe. Celle qui prend et celle qui tue. Déchirée entre corps et esprit. Mutilée par la foule et hantée par le regard des gens absents. Telle sera ta destinée.
Personne ne savait à quel point j’étais malheureuse. J’ai porté ce fardeau tant d’années qu’un jour mon coeur a explosé et ses lambeaux se sont disséminés dans l’atmosphère. Les gens ont continué à aimer, rire et sourire comme si de rien n’était. Ils savaient et ils n’ont rien dit. Ce jour-là, j’ai compris que je serai seule toute ma vie et que je n’aimerai jamais plus.