Le mouroir de Dolly.

Une ombre.

mardi 4 septembre 2012 à 15h25

La chaleur de sa peau mordait ma chair froide comme une fin d’été violente et sauvage. Je me consumais toute entière sous ses mains de feu impatientes et exigeantes. Peau contre peau, dans un étrange ballet charnel, nous tentions en vain d’atteindre les cieux. Comment en étais-je arrivée là ? Au loin, le hurlement d’un animal affamé retentissait dans la montagne.
Tu vas te tenir bien sage, compris ?
La porte claqua. L’homme des bois partait à la chasse.
Je recommençais à respirer progressivement. Etalée de tout mon long sur l’immense lit du chasseur, je me sentais telle une poupée désarticulée. Lentement je me levais, étourdie. Quelques pas, et je me retrouvais devant le miroir, étrangère à moi-même. Une jeune femme me fixait. Elle paraissait au bout du rouleau. Faible, tremblante. Cheveux en bataille, regard mort, peau blanche usée. Sous sa fine robe de lin apparaissaient les traces de coups, les bleus et les plaies. Depuis combien de temps vivait-elle en enfer, déjà ? Six mois, un an peut-être ?
C’est toujours mieux que la rue avait dit le vieux riche.
La porte se rouvrit à la volée. Le chasseur plongea sur sa proie. Il frappa encore et encore pendant que la victime pleurait doucement. Elle savait très bien comment tout ceci finirait. Comme toujours. La projetant contre le mur, il lui arracha ce qui lui restait de tissu sur le corps. Elle s’écroula sur le sol froid. Les yeux écarquillés d’horreur, elle se mit à trembler de plus en plus fort.
Il lui caressa longuement les cheveux en chantonnant doucement. Il savait être doux, le monstre. Il était simplement capricieux. Elle était son jouet. Et elle l’aimait. Parce qu’il était tout ce qui lui restait.
Lorsqu’il se lassa, il la retourna et termina le travail. Aussi sensible à sa détresse que les gens au-dehors. Ceux qui savaient mais ne disaient rien.
Là, sous les assauts brutaux d’un impatient, les larmes ne tarissaient plus mon visage déformé par le chagrin.

Je pensais à toi.