Laissez-là mourir. Voilà ce que disait mon rêve. Un rêve cauchemardesque à mi-chemin entre le désespoir et la folie. Qui étais-je, mirage de moi-même, pour condamner ou pardonner ? Je crois qu’elle avait été belle, autrefois, cette peau flétrie par les années. Mais ses yeux agonisants ne laissaient plus de place à la beauté. Et sa sœur, sa mère, son alter ego superbe et tranchant, cet infâme monstre en tout point son semblable, quel désespoir ornait ses traits ! Mourir, oui. Mais à quel prix. Tout s’entrechoquait, s’entremêlait autour de moi. Les voix confuses, la blancheur immaculée et le silence. C’est terriblement bruyant, le silence. Et à la fois tremblante et immobile, dévorée par la peur d’un futur trop proche, je suppliais mentalement de ne pas avoir à choisir. Dans tous les cas, j’aurais été perdante. C’était un piège. Une contrainte déguisée en choix. Le plastique qui l’enfermait ne se soulevait même plus à chacune de ses respirations trop faibles et je me sentais couler, littéralement, sur le sol froid ensanglanté. Son sang et le mien se mélangeaient de telle sorte que nos esprits se confondaient. Qui était-elle ? Qui étais-je ? Qui étions-nous ? Deux entités d’un seul et même corps se décomposant ? Il faut rendre au rouge ce qui lui appartient. Laissez-là mourir. Qui ? Elle ? Moi ? Nous ? Devais-je l’abandonner ? Devais-je abandonner ? Laissez-là mourir ou tuez-moi. Qui ? Qui êtes-vous ? Qui tue ? Qui meurt ? Tout se confond, se tord, se comprime. Qui rêve, qui vit ? Bonjour maman, voilà ta fille. Elle est morte là où tu l’as laissée crever. Les ombres se referment, le destin est scellé. Je cherche encore le piège. Rideau, s’il vous plaît.